Un certain nombre de nouvelles obligations dans le Code du travail ont pour effet de considérablement alourdir les charges administratives de l’employeur en ce qui concerne le suivi et l’enregistrement du temps de travail de l’ensemble de ses salariés.

Jusqu’à présent, il était tenu à faire figurer dans le « registre spécial » visé à l’article L. 211-29. du Code du travail, seulement les heures supplémentaires, de même que les heures prestées le dimanche, les jours fériés ou la nuit, autrement dit toutes les situations justifiant une majoration de rémunération. Or, une loi du 14 mars 20171 l’oblige désormais d’y saisir également « le début, la fin et la durée du travail journalier » de chacun de ses salariés. Par ailleurs, dans le cadre d’un horaire mobile il doit, depuis la réforme de l’organisation du temps de travail entrée en vigueur en début d’année, mettre en place un « système assurant un décompte exact des heures de travail prestées ».2 L’employeur doit donc à l’avenir être en mesure de présenter, notamment à la demande de l’Inspection du travail et des mines, un registre retraçant systématiquement, pour chaque jour, à quelle heure ses salariés ont commencé, interrompu et arrêté le travail, ceci indépendamment de la question de savoir s’ils travaillent selon un horaire fixe ou flexible. Il a été jugé à cet égard que « si l’absence de la tenue d’un registre reprenant l’horaire journalier et hebdomadaire de travail du salarié constitue un manquement de l’employeur à ses obligations légales, ce manquement à lui seul n’est cependant pas de nature à prouver l’existence d’heures supplémentaires » en cas de litige.3

À l’inverse, ce travail bureaucratique supplémentaire peut se révéler comme un avantage considérable lorsqu’il s’agit de détecter et de sanctionner des abus, tel un non-respect systématique des horaires de travail. Une illustration en est fournie par une récente affaire de manipulation du système de pointage. Le salarié en question avait systématiquement menti sur ses heures d’arrivée, soit en faisant pointer un collègue de travail à sa place, soit en indiquant des heures de présence inexactes à la personne en charge de l’administration du personnel. L’employeur avait su prouver que les heures d’arrivée réelles du salarié ne correspondaient pas à celles pointées dans l’ordinateur, ceci à huit fois sur une durée de seulement deux semaines. Selon la Cour d’appel, « les pointages inexacts systématiques et répétitifs ci-avant relevés sont d’une gravité suffisante pour ébranler immédiatement et définitivement la confiance de l’employeur en son salarié et justifient un licenciement sans préavis nonobstant son ancienneté de service importante. »4 La Cour d’appel a encore pu confirmer qu’une salariée bénéficiant du statut de cadre supérieur mais d’une ancienneté de seulement une année pouvait valablement se voir reprocher, dans le cadre d’un licenciement avec préavis, « ses neufs arrivées tardives sur une période de six mois, retards supérieurs à quelques minutes, alors qu’elle disposait cependant selon le système de l’horaire mobile, d’une plage horaire acceptable pour arriver le matin à son lieu de travail ». Même les cadres supérieurs ne peuvent donc pas se permettre « d’aller et de venir comme bon leur semble ».5

Patricia Hemmen
Conseillère auprès de la FEDIL