Étant donné les circonstances du confinement et pour rester à la hauteur de l’actualité, nous avons décidé de ne pas imprimer la deuxième édition de notre « Écho des entreprises » mais de maintenir exclusivement la version digitale du magazine avec ses rubriques habituelles. Afin de rester réactif face à l’actualité, l’Écho 2 publie, sous la rubrique « Zoom », une série spéciale consacrée aux entreprises qui poursuivent leurs activités dans de conditions difficiles et qui contribuent ainsi à des chaînes de valeur essentielles. L’engagement de tous ceux et celles qui travaillent dans ces entreprises et secteurs est également à souligner et à saluer. En effet, les réactions positives et encourageantes aux publications des articles sur nos réseaux sociaux, témoignent d’une population particulièrement reconnaissante.
Dès la fin du mois de février, l’activité économique a commencé à ralentir en raison de la propagation du nouveau coronavirus et des restrictions que cela a impliqué. Depuis la mi-mars, plusieurs activités au Grand-Duché se trouvent complètement à l’arrêt. Le cumul des arrêts imposés par la loi pour protéger la population et des arrêts ou ralentissements conjoncturels ou pour cas de force majeure engendre un coût économique considérable. Le gouvernement a mis en place un Programme de stabilisation de l’économie pour soutenir les entreprises en perte de revenus avec des instruments financiers qui visent le maintien des emplois et de la rémunération des travailleurs, l’attribution d’aides directes ainsi que l’offre de garanties sur des prêts destinées à alimenter les entreprises en liquidités. Ce plan de stabilisation, présenté le 25 mars dernier, nous paraît être à la hauteur des défis. Cependant, il s’agit de rester vigilant pour identifier d’éventuelles lacunes et pour vérifier si l’application pratique des instruments retenus correspond bien aux objectifs annoncés. En cas de besoin, le paquet pourra être corrigé ou étendu.
L’évaluation de la situation sur le terrain et l’offre d’instruments de soutien aux entreprises se fait dans un dialogue quasi permanent entre le gouvernement et les représentants des différents secteurs économiques. Contrairement à d’autres pays européens, notre cadre législatif ne prévoit pas un arsenal de mesures prêtes à l’emploi. Par conséquence, les ministères concernés ont dû faire preuve d’une grande réactivité pour ficeler leur plan de stabilisation. Nous nous trouvons face à un processus d’adaptations constantes sans la possibilité de nous appuyer sur des expériences préalables. Face à ce manque de prévisibilité, les déclarations politiques récentes des ministres impliqués sont rassurantes, car elles témoignent de leur volonté de rester agile et de parfaire le plan de stabilisation en fonction des retours du terrain et de la durée des arrêts d’activité.
À côté de la gestion de crise consacrée aux problèmes imminents causés par les arrêts et fermetures, les entreprises sont appelées à initier leurs préparations en vue d’une reprise d’activité. Une date de reprise ne se dessine pas encore à l’horizon, cependant, les employeurs et leurs représentants sectoriels auront le temps requis pour doter leurs entreprises de moyens et d’outils permettant d’éliminer ou de réduire au maximum les risques de contagion pour leurs travailleurs et le public qu’ils accueillent. La décision sur la relance des activités économiques appartient aux autorités de santé. Les chances de voir la relance d’un secteur d’activité donné et de garder ce dernier actif sans autres interruptions pour causes sanitaires dépendront entre autres des efforts de ce secteur en matière de protection de la santé des personnes circulant sur les sites en question.
Plusieurs industries sont restées actives, soit parce qu’elles font partie des chaînes de valeur essentielles, soit parce qu’elles occupent un rôle de fournisseur clé approvisionnant des secteurs de pointe restés actifs en Europe ou sur le plan global. Ces industries sont confrontées à de grands problèmes organisationnels causés par les congés pour raisons familiales, les mises en quarantaine et les congés de maladie. La FEDIL essaye d’y remédier en stimulant des prêts temporaires de main d’œuvre entre ses membres ou en orientant les demandeurs de profils vers la plateforme JobSwitch.lu.
Devant l’obligation légale de protéger la santé de leurs collaborateurs et dans le souci de les rassurer au maximum, ces industries se sont dotées des équipements de protection requis et elles ont implémenté les règles et procédures spécifiques afin d’éviter la transmission du virus. Les expériences ainsi gagnées sont souvent partagées avec d’autres industries dans le cadre d’un échange de bonnes pratiques, mis en place par la FEDIL, qui permet à chaque participant de parfaire ses connaissances et d’améliorer ainsi ses performances. Par ailleurs, ces expériences constitueront une bonne référence pour les entreprises dont l’activité a été à l’arrêt depuis le début de la crise et qui devront se mettre à niveau pour exécuter leurs mesures de protection dès le premier jour de reprise. Soucieux de faciliter une préparation sanitaire optimale dans les secteurs qu’ils couvrent, la FEDIL ainsi que le service de santé au travail de l’industrie (STI) étendront et alimenteront la plateforme d’échange de bonnes pratiques pour l’industrie et offriront un accompagnement professionnel à leurs membres respectifs.
En pensant à l’après-crise, on ne peut passer sous silence les dégâts qu’elle aura causés. À côté des dégâts socioéconomiques que nos gouvernements essaient de limiter le plus possible, il y aura également des dégâts politiques à déplorer. La plus grande casse aura produit un tas de débris bleus parsemés de petites étoiles jaunes. Les réflexes du repli sur soi, dont plusieurs États membres ont fait preuve pour gérer leur crise sanitaire, ont secoué les fondements de l’Union européenne. Les fermetures de frontières, les rétentions de matériel de première nécessité, les approches divergentes et déphasées en matière de confinement ne seront pas oubliées de sitôt et encore moins par les pays qui en auront souffert.
La Commission européenne a réagi dans le cadre de ses prérogatives et avec les instruments qui sont à sa disposition, surtout pour « permettre » aux États membres de lancer leurs paquets d’aides aux entreprises. Mais il ne faut pas se leurrer, car si elle a ouvert les vannes de sa politique de concurrence, beaucoup d’États membres ne l’auraient pas attendue dans le cas contraire. À la recherche de solutions solidaires offrant à tous les États membres un accès adéquat au financement de leur dette causée par la crise, les protagonistes politiques n’ont pas pu se mettre d’accord. L’Europe n’était pas préparée pour gérer ce type de crise dans une Union qui aurait pu faire la force ; les gouvernements n’ont jamais tâché de choisir une approche commune devant la menace du virus. Ces derniers sauront-ils en tirer les leçons, en cédant à l’exécutif européen les compétences pour améliorer la résilience de notre continent face à une prochaine menace de ce genre ? Une occasion à ne pas manquer pour sauver cette Union qui nous rallie. Le gouvernement luxembourgeois a clairement annoncé qu’il veut jouer la carte européenne. Ce geste était nécessaire.