L’économie européenne ne s’est pas aussi bien portée depuis dix ans. La croissance est au rendez-vous, le chômage continue de se résorber graduellement et les indicateurs avancés suggèrent un net regain de confiance. Malgré ces bonnes nouvelles sur le plan conjoncturel, l’analyse au niveau structurel est plus mitigée : la productivité ne s’est que peu améliorée au cours des quinze dernières années. En effet, entre 2000 et 2014, la productivité globale des facteurs a progressé de 1,5 % en zone euro alors qu’aux États-Unis, sur la même période, elle a augmenté de près de 11 %. Les institutions internationales estiment que la croissance potentielle de la zone euro est tombée en-dessous de 1 % par an, contrairement aux États-Unis où elle est estimée à plus de 2 %.
Afin d’augmenter la croissance potentielle de la zone euro ainsi que sa capacité de résistance à des chocs futurs, il est essentiel de continuer d’avancer sur les réformes structurelles. Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne, l’a encore rappelé récemment. La bonne nouvelle est que l’impact potentiel de ce type de réformes est particulièrement important en Europe : l’OCDE estime qu’une convergence vers les meilleures pratiques sur le marché du travail et celui des biens et services ainsi que dans les domaines de la politique fiscale et des retraites pourrait augmenter le PIB moyen par tête dans l’Union européenne de 11 % sur une période de dix ans.
Même si l’expérience montre que la plupart des réformes structurelles ont lieu pendant des périodes de crise, des études du Fonds monétaire international suggèrent que ces réformes sont plus efficaces lorsqu’elles sont mises en place quand les conditions macroéconomiques sont favorables. C’est le cas en zone euro aujourd’hui, grâce en particulier au soutien monétaire exceptionnel de la Banque centrale européenne qui a mené à des taux d’intérêt historiquement bas. Des réformes structurelles visant à augmenter l’investissement et la productivité devraient être particulièrement efficaces dans cet environnement puisque des taux d’intérêt bas favorisent le crédit à l’investissement. Par ailleurs, certaines réformes structurelles, notamment dans le domaine du marché de l’emploi, portent leurs fruits sur le long terme mais peuvent avoir des effets négatifs sur la demande à court terme. Si les conditions macroéconomiques sont favorables, il est en conséquence plus facile de mettre en place un accompagnement budgétaire pour neutraliser une telle chute temporaire de la demande.
Ainsi, l’argument selon lequel il ne faudrait pas trop pousser les réformes structurelles dans le contexte actuel parce qu’elles pourraient compromettre la reprise en zone euro ne semble pas vraiment convaincant. Ce qui est vrai pour la zone euro dans son ensemble l’est, a fortiori, pour le Luxembourg qui connaît actuellement une situation particulièrement favorable avec des taux de croissance supérieurs à 4 % par an.