Aux termes de l’article L. 415-5. (3) du Code du travail, dans une entreprise ayant un effectif compris entre 250 et 500 salariés, le chef d’entreprise est tenu de libérer de tout travail une personne de la délégation du personnel, en pratique appelée délégué libéré.

Un arrêt récent de la Cour d’appel1 a fourni des éclaircissements relatifs au maintien de la rémunération d’un tel délégué. Par requête du 26 juin 2017, la salariée, membre de la délégation du personnel depuis le 1er janvier 2014, a fait convoquer son employeur devant le tribunal du travail pour l’entendre condamner à lui payer une certaine somme d’argent à titre d’arriérés de salaire pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. Par avenant au contrat de travail, les parties ont convenu d’un changement d’affectation de la salariée pour la durée du mandat comme déléguée permanente à partir du 1er janvier 2014.

La salariée expose que depuis le début de son mandat en tant que déléguée du personnel, l’employeur n’aurait pas correctement continué le paiement des salaires alors que ses compléments de salaire pour le travail des week-ends, nuits et jours fériés, qu’elle avait touchés avant son mandat de déléguée, n’ont plus été réglés. Elle base sa demande sur l’article L. 415-5. (4) du Code du travail disposant que : « Les membres de la délégation ne peuvent percevoir une rémunération inférieure à celle qu’ils auraient perçue s’ils avaient effectivement travaillé pendant les heures de délégation. ».

L’employeur, quant à lui, soulève d’abord la prescription de la demande en paiement d’arriérés de salaire pour la période antérieure au 26 juin 2014 sur base de l’article L. 221-2. du Code du travail et soutient que pour la période ultérieure, la salariée n’aurait aucun droit à un supplément pour travail effectué pendant les week-ends, les nuits et les jours fériés du fait que les heures de la délégation étaient prestées en semaine. La Cour d’appel confirme la prescription de la demande en paiement du complément mensuel de salaire pour la période du 1er janvier au 25 juin 2014.

Ensuite, elle constate que le libellé de l’article L. 415-5. (4) du Code du travail est clair et non équivoque. Il ne donne pas lieu à interprétation. En application de ce texte, la salariée ne peut recevoir une rémunération inférieure à celle qu’elle aurait perçue, si elle avait effectivement travaillé pendant les heures de délégation.

La Cour d’appel retient que « pour prospérer dans sa demande en paiement, il appartient à l’actuelle appelante, en application de l’article 1315 du Code civil, d’établir qu’elle a travaillé les weekends, les nuits et les jours fériés. Or, une telle preuve laisse d’être rapportée. Au contraire, les parties sont d’accord pour reconnaître que A a exercé ses heures de travail en tant que déléguée exclusivement pendant les heures « de bureau normales. ».

Contrairement aux affirmations de l’appelante, il n’y a ni discrimination, ni traitement inégalitaire possibles étant donné qu’elle touche le même salaire que celui qu’elle aurait eu en travaillant en tant qu’aide-soignante pendant les mêmes heures. ».

La Cour d’appel adopte une position tout à fait censée dans la mesure où il paraît évident et logique pour l’employeur de ne rémunérer que les heures qui ont été effectivement prestées. Il appartient au salarié de prouver la prestation des heures donnant lieu à majoration, preuve qui faisait défaut en l’espèce.

Philippe Heck
Conseiller affaires juridiques et sociales auprès de la FEDIL