Dans une affaire très récente [1], une salariée a été engagée depuis le 1er juillet 2015 en tant qu’agent de nettoyage et a fait l’objet d’un licenciement avec effet immédiat en raison d’une absence injustifiée depuis le 30 juillet 2018, incluant également l’absence à l’entretien préalable au licenciement fixé au 14 août 2018 à 15 heures. La salariée a non seulement contesté le bien-fondé de ce licenciement (en argumentant notamment qu’elle aurait bénéficié de la protection contre le licenciement en vertu de l’article L. 121-6. du Code du travail), mais a, à titre subsidiaire, également estimé que le licenciement prononcé en date du 14 août 2018 aurait été irrégulier pour vice de forme. Le présent article se limite à l’analyse faite par la Cour d’appel quant à la prétendue irrégularité formelle de l’entretien préalable au licenciement et n’adresse dès lors pas le volet relatif au bien-fondé du licenciement opéré par l’employeur.

D’après l’article L. 124-2. (1) du Code du travail, « Lorsque l’employeur qui occupe cent cinquante salariés au moins envisage de licencier un salarié, il doit, avant toute décision, convoquer l’intéressé par lettre recommandée ou par écrit dûment certifié par un récépissé en lui indiquant l’objet de la convocation ainsi que la date, l’heure et le lieu de l’entretien. Copie de la lettre de convocation doit être adressée à la délégation du personnel ». Le nombre des salariés de l’entreprise est apprécié au jour du licenciement. En cas de non-organisation par l’employeur d’un tel entretien préalable au licenciement ou en cas de méconnaissance d’une formalité jugée substantielle liée au déroulement de cet entretien préalable, le licenciement est susceptible d’être déclaré irrégulier pour vice de forme tel que prévu par le point (4) de l’article du Code du travail précité. La Cour d’appel [2] a par exemple retenu l’irrégularité formelle d’un entretien préalable au licenciement ayant été fixé par l’employeur durant une période de congé du salarié. Elle a ainsi statué que le fait que le congé ait été accordé par l’employeur rendait la tenue de l’entretien préalable au licenciement durant cette même période impossible.

D’après le paragraphe 3 du même article, « le licenciement avec préavis ou pour motif grave du salarié doit être notifié au plus tôt le jour qui suit celui de l’entretien préalable et au plus tard 8 jours après cet entretien ».

Dans l’arrêt soumis à étude, la Cour d’appel a néanmoins constaté que « le licenciement est intervenu le même jour que celui fixé pour l’entretien préalable auquel la salariée ne s’est pas présentée. L’employeur n’a partant pas respecté le délai prévu par la disposition précitée. La sanction prévue dans cette hypothèse est définie à l’article L. 124-12. (3) en ce sens que « la juridiction du travail qui conclut à l’irrégularité formelle du licenciement en raison de la violation d’une formalité qu’elle juge substantielle doit examiner le fond du litige et condamner l’employeur, si elle juge que le licenciement n’est pas abusif quant au fond, à verser au salarié une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ou de traitement. L’indemnité visée à l’alinéa qui précède ne peut être accordée lorsque la juridiction du travail juge le licenciement abusif quant au fond ».

En l’espèce, la Cour d’appel a relevé à bon droit que la salariée est restée en défaut de préciser en quoi le défaut pour l’employeur d’avoir respecté le délai institué pour licencier suite à l’entretien préalable serait à assimiler à la violation d’une formalité substantielle au sens du prédit article, étant précisé qu’elle ne s’est pas présentée à l’entretien préalable.
La demande de la salariée basée sur l’article L. 124-12. (3) du Code du travail a par conséquent été rejetée. Ainsi, le licenciement notifié le même jour pour lequel le salarié a été invité à son entretien préalable ne constitue dès lors pas d’irrégularité formelle donnant lieu au versement de l’indemnité pour vice de forme si le salarié ne s’est pas présenté à l’entretien cité.
Il convient de préciser que l’arrêt analysé suit la jurisprudence existante en la matière.Dans un autre arrêt [3], la Cour d’appel avait déjà précisé, à notre vue à juste titre, qu’une notification du licenciement au-delà du 8ième jour suivant l’entretien préalable ne constitue pas une formalité substantielle au sens de l’article L. 124-12. (3) du Code du travail. Finalement, il paraît encore important à noter dans ce contexte que l’employeur n’a pas non plus d’obligation de reporter la date de l’entretien préalable en cas de maladie du salarié le jour de cet entretien si le salarié n’a pas formellement demandé son report et si des sorties durant son incapacité de travail étaient autorisées par son certificat médical [4].


[1] Cour d’appel, 5 novembre 2020, n° CAL-2019-00463 du rôle.

[2] Cour d’appel, 28 juin 2018, n° 44349 du rôle.

[3] Cour d’appel, 17 mars 2016, n° 41567 du rôle.

[4] Cour d’appel, 25 octobre 2018, n° 44428 du rôle.

Philippe Heck
Conseiller affaires juridiques et sociales auprès de la FEDIL