L’Avant-propos


La législation relative à la période de référence, au plan d’organisation du travail (POT) et à la durée de travail hebdomadaire moyenne fut introduite par la loi dite PAN du 12 février 1999 mettant en œuvre le plan d’action national en faveur de l’emploi 1998. La validité des articles issus de cette loi était initialement limitée à fin de l’année 2011 mais, à défaut de nouvelles dispositions pour les remplacer, leur application fut prorogée plusieurs fois. Au final, ces articles sont restés en vigueur jusqu’au 31 décembre 2016, c’est-à-dire jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi du 23 décembre 2016 concernant l’organisation du temps de travail qui fait l’objet de cette publication.1

Depuis longtemps, les partenaires sociaux étaient en accord sur la nécessité d’une réforme afin de moderniser le cadre législatif de l’organisation du temps de travail. Alors que non seulement les entreprises mais aussi leurs salariés demandaient des mesures leur permettant d’organiser de manière plus flexible le temps de travail, un accord de principe sur les grandes orientations de la réforme a pu être trouvé avec le gouvernement le 14 janvier 2015. En contrepartie de l’engagement des entreprises à soutenir des réformes visant à rendre plus souple le congé parental et les congés spéciaux, la période de référence légale devait être allongée au-delà sa durée maximale de 1 mois. Cet allongement était destiné à contribuer à une augmentation de la productivité des entreprises et leur adaptation au contexte économique, avec le but de favoriser également la création et le maintien de l’emploi. Dès l’annonce par le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Economie sociale et solidaire de l’orientation concrète de sa réforme cependant, il était clair que les nouvelles dispositions n’allaient pas être l’instrument approprié pour atteindre ces objectifs. Alors que la FEDIL, dans le cadre des discussions et négociations politiques préalables, a formellement désapprouvé le projet de loi tel que présenté par le ministre et a incessamment insisté sur la nécessité de réduire au strict minimum les conditions et le formalisme liés à la flexibilisation du temps de travail, le texte tel qu’il fut adopté ne manque pas de telles contraintes.

Ainsi, toute entreprise qui voudra faire usage de la nouvelle possibilité de recourir, sans convention collective de travail et sans système d’horaire mobile, à une période de référence d’une durée supérieure à 1 mois et jusqu’à 4 mois au maximum, sera confrontée à :

  • Plus de limites : d’une part, elle sera soumise à une nouvelle durée de travail maximale mensuelle (qui diminue au fur et à mesure que la durée de la période de référence augmente) et, d’autre part, elle devra respecter un délai de préavis pour informer le salarié en cas de changement de son horaire de travail.
  • Plus de coûts : en outre, elle sera obligée d’accorder aux salariés concernés des jours supplémentaires de congé (dont le nombre augmente au fur et à mesure que la durée de la période de référence augmente) et d’introduire un nouveau taux de majoration pour compenser les changements d’horaire dont le salarié n’a pas été informé avec le préavis.
  • Plus de bureaucratie : des charges administratives viennent s’ajouter pour décompter tous ces nouveaux congés, seuils et majorations et maîtriser les procédures qui les accompagnent.

La flexibilité accordée par la nouvelle législation est donc très limitée, difficile à appliquer et onéreuse, à tel point qu’elle risque de rendre tant économiquement, que d’un point de vue organisationnel, inintéressante toute extension de la période de référence légale au-delà la durée de 1 mois. La FEDIL en conclut que la nouvelle législation ne correspond pas à l’esprit de l’accord du 14 janvier 2015. Ceci est particulièrement déplorable alors que les entreprises ont, de leur côté, largement atteint et même dépassé leurs objectifs ambitieux en matière d’emploi et de chômage tels que prévus par le programme « Entreprises, partenaires pour l’emploi» défini dans le cadre de cet accord avec comme objectif la réduction des taux de chômage.

Soucieuse d’éclairer les entreprises dans l’application des nouvelles dispositions, la FEDIL a organisé deux conférences les 11 et 12 janvier 2017, l’une en langue française et l’autre en allemand, et élaboré le suivant Guide.

Guide de l’organisation du temps de travail

Introduction


La durée de travail légale normale au Luxembourg est de 8 heures par jour et 40 heures par semaine.2

En principe, les heures travaillées au-delà de ces durées journalières et hebdomadaires sont des heures supplémentaires que l’employeur doit compenser par des suppléments de salaire ou de repos.

Les salariés peuvent toutefois être occupés au-delà de ces limites sans suppléments, à condition que la durée moyenne de travail n’excède pas la durée de travail normale fixée au contrat de travail sur une certaine période que le Code du travail appelle une « période de référence ».

Au cours d’une telle période de référence en effet, une heure travaillée au-delà de la durée normale à un certain moment peut devenir, sous certaines conditions, une heure de flexibilité qui peut être récupérée 1 par 1 à un autre moment, sans donner lieu à majoration.

  • Une période de référence d’une semaine permet d’augmenter la durée journalière de travail des salariés jusqu’à 9 heures, sans que la 9ième heure soit considérée comme une heure supplémentaire sujette à majoration.

Une telle période de référence hebdomadaire peut être appliquée par l’entreprise sans formalités ou procédures, à condition que

  • les heures de travail hebdomadaires sont réparties sur 5 jours ou moins et que
  • le total de la durée de travail ne dépasse pas la durée de travail normale hebdomadaire en vigueur dans l’entreprise (40 heures le plus souvent).
  • Une période de référence supérieure à la semaine permet de porter les durées journalières et hebdomadaires au-delà de 9 heures par jour et de 40 heures par semaine.

Exemple d’une période de référence de 4 semaines

Semaine Temps de travail
1ère semaine 40 heures
2ième semaine 32 heures
3ième semaine 48 heures
4ième semaine 40 heures
Total 160 heures
Moyenne 40 heures

 

Une telle période de référence est cependant liée à certaines contraintes qui ne sont pas les mêmes selon qu’il s’agit d’une :

  • Période de référence résultant d’une décision unilatérale de l’employeur dans le cadre d’un plan d’organisation du travail (POT).
  • Période de référence résultant d’une négociation entre partenaires sociaux dans le cadre d’une convention collective ou d’un règlement d’horaire mobile.

Veuillez noter que pour faciliter l’illustration, les tableaux et calculs contenus dans le présent Guide sont basés sur des hypothèses de travail de 4 semaines par mois.

I. La période de référence légale résultant d’une décision unilatérale de l’employeur

A défaut de convention collective ou au cas où la convention collective ne contient pas de dispositions relatives à une période de référence, l’entreprise peut opter de sa propre initiative pour une période de référence dite « période de référence légale », à condition d’établir un plan d’organisation du travail (POT).

Comme son nom l’indique, la période de référence légale est réglementée en détail par la loi.

A. Durée de la période de référence légale

La période de référence légale peut être de plusieurs durées différentes, mais jamais de plus de 4 mois. Elle peut être exprimée en semaines ou en mois de calendrier.

L’employeur peut donc librement choisir la durée de la période de référence légale qui sera applicable, mais sans dépasser les 4 mois (ex. 4 semaines, 1 mois, 6 semaines, 8 semaines, 2 mois, …, 4 mois).

En fonction de la durée choisie, les exigences légales peuvent toutefois varier considérablement. L’employeur aura donc intérêt à prendre en considération, avant d’opérer son choix, l’ensemble des dispositions qui accompagnent les différentes durées que peut avoir la période de référence légale.

Des différences essentielles existent surtout entre les périodes de référence légales inférieures ou égales à 1 mois et celles qui sont supérieures à 1 mois.

i Période de référence légale ayant une durée supérieure à 1 mois

L’entreprise peut recourir de sa propre initiative à une période de référence supérieure à 1 mois dans le cadre d’un POT. Or, l’application d’une période de référence légale pareille est conditionnée par l’octroi de jours de congé supplémentaires et le respect de durées maximales de travail inférieures au droit commun.

Jours additionnels de congé

Selon la durée de la période de référence légale choisie par l’entreprise, il sera dû aux salariés effectivement concernés par le POT en question un nombre variable de jours de congé supplémentaires, à savoir :

  • en cas de période de référence ayant une durée entre plus de 1 mois et 2 mois au maximum un congé supplémentaire de 1 jour et ½ par an,
  • en cas de période de référence ayant une durée entre plus de 2 mois et 3 mois au maximum un congé supplémentaire de 3 jours par an,
  • en cas de période de référence ayant une durée entre plus de 3 mois et 4 mois au maximum un congé supplémentaire de 3 jours et ½ par an.

Exemple : PR successives de 4 mois

Périodes de référence successives du temps de travail de 4 mois

En cas de besoin, ces jours de congé supplémentaires sont proratisés. Cela peut devenir nécessaire notamment dans les hypothèses suivantes :

  • le salarié est occupé à temps partiel,
  • le salarié n’est concerné que par une partie des POT,

Exemple : PR différentes

  • l’entreprise a recours à des périodes de référence successives ayant des durées différentes et qui génèrent chacune un nombre différent de congés supplémentaires (ou dont certaines seulement génèrent des congés supplémentaires).
Périodes de référence différentes du temps de travail

Exemple : Année incomplète

  • l’entreprise applique des périodes de référence pendant une partie de l’année seulement.
Périodes de référence du temps de travail d'une année incomplète

Exemple : Années différentes

  • la période de référence est en vigueur pendant une période qui ne correspond pas à des années de calendrier entières.
Périodes de référence du temps de travail des années différentes

Limitation des dépassements du temps de travail normal

Une période de référence fournit le cadre pour des heures de flexibilité, c’est-à-dire des heures que le salarié travaille en plus de ses heures normales de travail (8 et 40 heures le plus souvent) à un certain moment et qu’il peut ensuite récupérer une par une à un autre moment, sans générer des suppléments à compenser ou à rémunérer.

Même en présence d’une période de référence cependant, les heures travaillées ne peuvent en aucun cas dépasser les durées maximales de travail fixées par le Code du travail. Si la période de référence reste inférieure ou égale à 1 mois, les maxima habituels de 10 heures par jour et 48 heures par semaine sont applicables en principe. Si tel est le cas, la limite de dépassement de la durée de travail correspond à 20% (= taux de dépassement entre les 40 heures normales et les 48 heures maximales).

Or, si la durée de la période de référence dépasse le seuil de 1 mois, ces maxima habituels se trouvent réduits au fur et à mesure que la durée de la période de référence légale augmente. En effet, dans ce cas, les taux de dépassement sont limités à:

  • 12,5% de la durée de travail normale en cas de période de référence ayant une durée entre plus de 1 mois et 3 mois au maximum, ce qui correspond à une durée maximale moyenne de travail de 45 heures (180 heures en total par mois sur base d’une hypothèse de travail de 4 semaines par mois),
  • 10% de la durée de travail normale en cas de période de référence ayant une durée entre plus de 3 mois et 4 mois au maximum, ce qui correspond à une durée maximale moyenne de travail de 44 heures (176 heures en total par mois sur base d’une hypothèse de travail de 4 semaines par mois).

Ces taux de 12,5% respectivement 10% sont à respecter dans le cadre de chaque POT.

Toute heure prestée au-delà de ces deux taux doit être compensée comme travail supplémentaire.

Exemple sans heures supplémentaires

Limitation des dépassements du temps de travail normal exemple sans heures supplémentaires

Exemple avec heures supplémentaires

Limitation des dépassements du temps de travail normal exemple avec heures supplémentaires
Explications

Heures de flexibilité = heures au-delà de la durée normale (40 heures / 160 heures) jusqu’à dépassement de

– 12,5% en cas de période de référence entre plus de 1 mois et 3 mois
= 45 heures / 180 heures

– 10% en cas de période de référence entre plus de 3 mois et 4 mois
= 44 heures / 176 heures

Heures supplémentaires =heures au-delà des dépassements de 12,5% ou 10%

– jusqu’à dépassement maximum de 20%
= 48 heures / 192 heures

Maximum d’heures pouvant être récupérées sans suppléments par période de référence :

  • période de référence de 2 mois: 20 heures
  • période de référence de 3 mois: 40 heures
  • période de référence de 4 mois: 48 heures

Dans le premier exemple ces limites sont respectées. Dans le deuxième exemple cependant, bien que la durée de travail normale de 40 heures / 160 heures ne soit pas dépassée en moyenne sur la période de référence, elle est dépassée de 20% au lieu des 10% autorisés (192 au lieu de 176 heures) au cours des mois 1 et 3.

Ces taux de 12,5 respectivement 10% sont toujours à considérer par rapport aux heures de travail normales applicables à un salarié occupé à temps plein.

Le temps de travail effectif du salarié à temps partiel, dont la durée hebdomadaire est inférieure à la durée normale, ne peut pas dépasser la durée prévue au contrat de travail :

  • ni en moyenne sur la période de référence applicable, – ni de plus de 20% sur la journée ou la semaine (sauf si le contrat de travail le permet expressément),
  • ni au-delà de la durée de travail normale d’un salarié à temps plein du même établissement ou de la même entreprise.

Le POT doit établir avec précision les règles applicables aux salariés à temps partiel.

ii Période de référence légale ayant une durée inférieure ou égale à 1 mois

Les congés supplémentaires ainsi que les limites de 12,5% respectivement 10% ne concernent que les entreprises qui appliquent ou introduisent une période de référence légale supérieure à 1 mois dans le cadre d’un POT, sans convenir d’une convention collective ou d’un règlement d’horaire mobile.

Toute entreprise qui actuellement organise son temps de travail sur une période de référence de 4 semaines ou 1 mois peut continuer à fonctionner ainsi sans aucune nouvelle condition. Elle n’est pas obligée d’allonger la durée de sa période de référence légale au-delà sa durée actuelle et, à défaut, elle n’aura pas à se préoccuper des nouvelles exigences légales relatives aux congés et aux durées maximales de travail. Il en va de même pour les entreprises qui opteraient pour une période de référence inférieure ou égale à 1 mois.

iii Tableau récapitulatif des différentes périodes de référence légales

Les entreprises ont donc le choix entre différents systèmes qui peuvent être illustrés comme suit (pour faciliter l’illustration, le tableau est basé sur l’hypothèse de travail de 4 semaines par mois):

Période de référence3 Congé supplémentaire4 Congé annuel Total5 Maximum d’heures (Jour)6 Maximum d’heures (Semaine)6 Moyenne d’heures (Semaine)6 Maximum d’heures (4 semaines)6
1 0 25 10 48 40 160
>1-2 1,5 26,5 10 48 45 180
2 1,5 26,5 10 48 45 180
>2-3 3 28 10 48 45 180
3 3 28 10 48 45 180
>3-4 3,5 28,5 10 48 44 176
4 3,5 28,5 10 48 44 176

B. Procédure en cas de période de référence légale

Si l’employeur décide d’instaurer une période de référence légale, il doit le faire selon une procédure strictement prescrite. La procédure est la même, que ce soit pour introduire la période de référence légale (dans une entreprise qui jusqu’alors tournait sans période de référence) ou pour modifier, par exemple, la durée d’une période de référence existante.

i Introduction d’une période de référence légale

Avant l’introduction d’une période de référence légale, l’employeur doit préalablement informer et consulter son personnel.

  • Dans les entreprises qui ne disposent pas d’une délégation du personnel (notamment parce que de par leur taille elles ne pas soumises à cette obligation), l’ensemble des salariés concernés doivent être informés et consultés.
  • Dans les entreprises qui disposent d’une délégation du personnel, cette procédure se déroule dans le cadre de l’information-consultation sur la vie de l’entreprise prévue à l’article L. 414-3. du Code du travail. Cette disposition accorde, depuis la récente réforme de la délégation du personnel qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2016, à la délégation du personnel la mission « de rendre son avis sur les questions relatives au temps de travail ». Rappelons que dans les domaines où l’information et la consultation sont obligatoires, la loi prévoit que la délégation du personnel est en droit de formuler des avis, de se réunir avec l’employeur et d’obtenir une réponse motivée à ses avis. La décision finale d’introduire ou de changer une période de référence relève donc des pouvoirs de l’employeur.

Il a été souligné, dans ce contexte, que la possibilité d’opter pour une période de référence jusqu’à 4 mois s’applique sans préjudice de l’article L. 121-7. du Code du travail, qui dispose que toute modification en défaveur du salarié portant sur une clause essentielle du contrat de travail doit, sous peine de nullité, être notifiée au salarié.7

La décision relative à l’introduction d’une période de référence déterminée trouve application au plus tôt 1 mois après que la procédure d’information et de consultation ait été entamée. Il ne semble aucunement impératif que la procédure ait été achevée. Il suffit donc qu’un mois soit passé depuis le début de la procédure, avant de commencer à appliquer la période de référence.

La loi précise que la décision relative à l’introduction ou au changement d’une période de référence est prise pour une durée de 24 mois. Elle est cependant tacitement renouvelable. L’entreprise peut donc, une fois l’information-consultation initiale entamée, se faire succéder en boucle continue des périodes de référence de même durée sans aucune nouvelle obligation en matière d’information et de consultation. Il en va de même pour l’entreprise qui applique déjà une période de référence (de 4 semaines ou 1 mois) au moment de l’entrée en vigueur de la Loi. A condition de ne pas en changer la durée, elle peut continuer à appliquer cette même période de référence (de 4 semaines ou 1 mois) sans information-consultation.

Il a été précisé que l’initiative de remettre en question une certaine période de référence et d’appliquer une période de référence différente appartient à l’employeur.8

Chaque décision relative à l’introduction ou au changement d’une période de référence est à notifier à l’Inspection du travail et des mines dans le mois de sa prise d’effet.

ii Changement d’une période de référence légale

Toute entreprise peut à tout moment changer sa période de référence légale, notamment quant à sa durée, à condition cependant d’entamer à nouveau la procédure décrite ciavant (information-consultation, respect du délai de 1 mois avant la prise d’effet du changement, notification à l’ITM,…).

iii Etablissement d’un POT

L’entreprise qui applique la période de référence légale doit établir un planning que le Code du travail appelle « plan d’organisation du travail », plus connu sous son abréviation POT.

Le POT détermine les heures de travail des salariés de l’ensemble ou de parties de l’entreprise au cours de la période couverte par le POT en fonction de l’activité prévisible de l’entreprise au cours de cette même période.

Durée du POT

La durée minimale que doit avoir chaque POT est fonction de la durée de la période de référence légale qui est appliquée:

  • si elle est inférieure à 1 mois, la durée du POT doit correspondre à la durée de la période de référence,
  • si elle est supérieure ou égale à 1 mois, le POT doit couvrir au moins 1 mois,

Il n’est donc pas nécessaire de fixer par avance les horaires de travail des salariés sur l’ensemble de la période de référence. La période de référence peut être couverte par plusieurs POT successifs mais chacun de ces POT doit avoir une durée de 1 mois au minimum.

Contenu du POT

Sans nécessairement être nominatif, le POT doit permettre à tout salarié ainsi qu’à son supérieur hiérarchique direct de connaître sans équivoque l’horaire de travail qui lui est applicable.

Tout POT doit contenir, sous peine de nullité, les mentions suivantes:

  • le début et la fin de la période de référence et du POT,
  • l’horaire de travail normal permettant à tout salarié de connaître son organisation du travail, c’est-à-dire les heures de travail par jour et par semaine ainsi que le début et la fin du travail journalier,
  • les jours de fermeture de l’entreprise, les jours fériés légaux et usuels ainsi que les congés individuels ou collectifs,
  • le repos hebdomadaire de 44 heures consécutives et, le cas échéant, le congé compensatoire dû si ce repos n’est pas respecté.

Des modalités supplémentaires peuvent être ajoutées au POT et sa durée peut être modifiée le tout d’un commun accord entre l’entreprise et la délégation du personnel. Si l’entreprise ne dispose pas de délégation du personnel, les salariés concernés doivent donner leur accord. Cette procédure ne peut pas avoir comme conséquence la fixation d’une durée du POT inférieure à 1 mois en cas de période de référence légale supérieure ou égale à 1 mois.

Communication du POT

Au plus tard 5 jours francs avant son entrée en vigueur, chaque POT doit être

  • établit par l’employeur,
  • soumis à l’avis de la délégation du personnel, ou, à défaut, à l’avis des salariés concernés, et
  • communiqué à tous les salariés concernés par le moyen le plus approprié.

En cas de désaccord de la délégation ou, à défaut, des salariés concernés, se documentant par un avis négatif et dûment motivé à propos du POT, le litige est soumis par la partie la plus diligente au directeur de l’ITM ou à son délégué, qui, dans le mois de la saisine, tente de trouver un accord entre parties. En cas de subsistance du désaccord dûment constaté par le directeur de l’ITM ou son délégué, l’Office national de conciliation peut être saisi par la partie la plus diligente. La saisine de ces instances n’a pas d’effet suspensif sur la mise en œuvre du POT litigieux.

Modification du POT

Si en cours d’application du POT l’employeur est confronté à un événement l’obligeant de le modifier, un délai de préavis d’au moins 3 jours doit être respecté pour annoncer cette modification au salarié concerné.

2 hypothèses peuvent se présenter:

i Le préavis est respecté et le salarié est prévenu de la modification du POT au moins 3 jours à l’avance

Le travail presté au-delà des limites fixées par le POT pour la journée, la semaine ou le POT entier n’est pas considéré comme travail supplémentaire – à condition évidemment que le changement n’entraîne pas en même temps un dépassement des durées maximales de travail (compte tenu également des taux de 12,5% respectivement 10%).

ii Le préavis n’est pas respecté et le changement intervient à l’initiative de l’employeur moins de 3 jours avant l’événement

De nouveau il convient de distinguer entre 2 hypothèses :

  • Le changement n’entraîne pas une augmentation des heures de travail initialement planifiées mais un simple changement d’horaire

Les 2 premières heures de travail déviant de l’horaire initial sont compensées au taux horaire normal de 1,0 pour une heure travaillée. Aucun taux de majoration ne s’applique donc pour les 2 premières heures ainsi prestées puisque le dérangement causé par un décalage aussi marginal de l’horaire prévu dans le POT est considéré comme ne justifiant pas un supplément.9

Les heures de travail déviant de l’horaire initial de plus de 2 heures sont compensées en temps de repos rémunéré ou en numéraire à raison de 1,2 heure pour une heure travaillée. En matière fiscale et de sécurité sociale, ce nouveau taux de majoration est à traiter de la même manière que pour les heures supplémentaires.

Tableau illustratif :

Plan d’organisation du travail exemplaire

Explications :

Le POT initial prévoit un horaire de travail de 12:00 à 20:00 heures. Suite au changement qui est opéré par l’employeur (sans respecter le délai de préavis), le POT prévoit un horaire de travail de 8:00 à 16:00 heures. Seul l’horaire de travail a changé. Il n’y a pas d’augmentation des heures de travail initialement planifiées. La durée de travail journalière est toujours égale à 8 heures. Les heures qui étaient déjà prévues par l’horaire initial (entre 12:00 et 16:00 heures) ainsi que les 2 premières heures de travail dépassant l’horaire initial (entre 10:00 et 12:00 heures) sont à rémunérer au taux horaire normal (100%). Les heures de travail dépassant l’horaire initial de plus de 2 heures (entre 8:00 et 10:00 heures) sont compensées à raison de 1,2 heure pour une heure travaillée.

  • Le changement entraîne une augmentation des heures de travail initialement planifiées et non pas un simple changement d’horaire

Le travail presté au-delà des limites fixées par le POT est considéré comme travail supplémentaire sous la nouvelle législation. Les taux applicables sont donc ceux qui sont prévus à l’article L. 211-27. du Code du travail (taux de compensation de 1,5 ou taux de rémunération de 1,4).

  • Le salarié demande de ne pas se voir appliquer le changement d’horaire

Le salarié concerné par un changement du POT intervenu à l’initiative de l’employeur moins de 3 jours avant l’événement peut demander de ne pas se voir appliquer ce changement.

La demande du salarié doit être motivée par des raisons impérieuses et fondées.

Il ne peut pas faire cette demande si l’employeur a été obligé de procéder au changement en raison d’un des cas de force majeure prévus aux points 2 et 3 de l’article L.231-2. du Code du travail (travaux de nettoyage, de réparation et de conservation nécessaires à la continuation régulière de l’exploitation de l’entreprise, travaux autres que ceux de la production, dont dépend la reprise régulière de l’exploitation le jour suivant ou travaux nécessaires pour empêcher la détérioration des matières premières ou des produits – pour autant que l’exploitation normale de l’entreprise ne permet pas de les exécuter un autre jour de la semaine).

En cas de désaccord exprimé par l’employeur, la délégation ou le salarié concerné peut saisir l’ITM pour avis écrit concernant le caractère impérieux et fondé des motifs invoqués par le salarié. L’ITM rend son avis dans les 2 semaines à partir de sa saisine.

Le texte précise expressément que toutes ces dispositions ne s’appliquent qu’à condition que les changements du POT interviennent à la demande de l’employeur, ceci afin d’éviter que des accords personnels intervenus entre salariés ou des demandes directes de certains salariés concernant un changement d’horaire ou de temps de travail mettent l’employeur dans l’obligation de rémunérer des heures supplémentaires.10

II. La période de référence résultant d’une négociation entre partenaires sociaux

En cas de période de référence supérieure à 1 mois négociée dans le cadre d’une convention collective ou d’un horaire mobile, les congés supplémentaires et les nouvelles limites de temps de travail dérogatoires ne sont pas applicables.

A.  La période de référence dans les entreprises couvertes par une convention collective

En présence d’une convention collective de travail, d’un accord subordonné ou d’un accord en matière de dialogue social interprofessionnel qui contient des dispositions instituant une période de référence au sein de l’entreprise on parle de « période de référence conventionnelle » ou de « période de référence négociée ».

A travers une telle période de référence conventionnelle ou négociée, il est possible de réduire ou d’allonger la durée de la période de référence jusqu’à une durée de 12 mois au maximum.

La convention collective contient des dispositions relatives à une période de référence

Au cas où la période de référence conventionnelle ou négociée est distincte de la période de référence légale, la convention collective ou l’accord applicable doit déterminer les principes applicables quant à la périodicité, au contenu et aux modalités du POT à établir dans l’entreprise ou les entreprises en question.

Les congés supplémentaires et les limites de 12,5% respectivement 10% ne sont pas d’application en cas de période de référence conventionnelle ou négociée du fait que la nature de la compensation pourra être négociée librement dans le cadre de l’élaboration de la convention collective. Les parties à la convention ne sont donc aucunement obligées de discuter de congés supplémentaires, d’autres contreparties que celles prévues pour la période de référence légale étant tout à fait possibles.11

Les conventions collectives en vigueur au moment de l’entrée en vigueur de la réforme restent d’application jusqu’à leur échéance.

La convention collective ne contient aucune disposition relative à une période de référence

Dans ce cas, l’entreprise peut toujours opter pour la période de référence légale d’une durée maximale de 4 mois. Toutefois, lorsque la convention collective en vigueur au moment de l’entrée en vigueur de la réforme ne prévoit aucune disposition relative à une période de référence ou se limite à faire un renvoi au droit commun, la durée de la période de référence applicable jusqu’à l’échéance de la convention collective ne peut pas dépasser 1 mois.

Il a été précisé que cette disposition transitoire s’appliquera pendant toute la durée restante de la convention, y compris la phase de négociation suite à une dénonciation, sachant que la convention dénoncée cesse ses effets dès l’entrée en vigueur d’une nouvelle convention ou au plus tard le 1er jour du 12e mois de sa dénonciation.12

B. La période de référence dans les entreprises couvertes par un horaire mobile

Si en principe l’application d’une période de référence demande l’établissement de POT, ce système des POT peut aussi être remplacé par un système d’horaire mobile.

L’horaire mobile est défini comme un système d’organisation du travail qui permet d’aménager au jour le jour la durée et l’horaire individuels de travail. Ce système réserve la faculté au salarié d’aménager l’horaire et la durée de travail journalière selon ses convenances personnelles.

Cependant, il reste tenu au respect :

  • du règlement interne sur le fonctionnement de l’horaire mobile,
  • des durées légales maximales de travail (soit 10 heures par jour et 48 heures par semaine),
  • des besoins de service et des désirs justifiés des autres salariés.

Les entreprises qui n’appliquent pas de POT mais qui ont recours à l’horaire mobile ne sont pas tenues d’accorder les congés supplémentaires ni de respecter les seuils de 12,5% respectivement 10% prévus par la nouvelle législation, alors que l’introduction d’un tel système se fait par voie de négociation collective ou d’un commun accord entre parties. Ainsi, la décision relative à l’institution d’un horaire mobile ainsi que sa périodicité, son contenu et ses modalités y compris les modifications est prise dans le cadre d’une convention collective de travail, d’un accord subordonné, d’un accord en matière de dialogue social interprofessionnel ou d’un commun accord entre l’entreprise et la délégation du personnel ou, à défaut, les salariés concernés. La codécision devient donc le principe en la matière, et ce quel que soit le nombre de salariés occupés.

L’entreprise doit mettre en place un système assurant un décompte exact des heures de travail prestées.

Si en fin de période de référence le décompte indique :

  • un excédent d’heures, cet excédent constitue du travail supplémentaire au sens des dispositions des articles L.211- 22. et suivants du Code du travail, à condition que ces heures aient été prestées à la demande de l’employeur pour les besoins de service.

Pour les périodes de référence légales dont la durée est inférieure ou égale à 1 mois, le règlement de l’horaire mobile peut déterminer un nombre d’heures de travail excédentaires qui peut être reporté à la période de référence suivante.

Le report d’heures excédentaires n’est pas toléré pour les périodes de référence légales entre plus de 1 mois et 4 mois.

  • un déficit d’heures, ce débit doit être régularisé dans un délai à définir par le règlement de l’horaire mobile par dépassement du temps de travail normal au cours de la période de référence suivante sans donner lieu à des majorations pour heures de travail supplémentaires, ceci dans le respect des limites imposées par la loi (à savoir 10 heures par jour et 48 heures par semaine).

La délégation du personnel reçoit communication des relevés des décomptes globaux par unité d’organisation. En cas de contestation des décomptes globaux, la délégation peut s’adresser à l’ITM qui doit procéder à une vérification. Elle dresse un rapport à l’entreprise et à la délégation du personnel. En cas de subsistance du désaccord dûment constaté par le directeur de l’ITM ou son délégué, l’Office national de conciliation peut être saisi par la partie la plus diligente.

III. La période de référence et les heures supplémentaires

Même en cas de période de référence, certaines heures sont à considérer comme des heures supplémentaires. Il s’agit des heures suivantes :

  • les heures supplémentaires constatées en fin de période de référence,
    – celles résultant du non-respect du délai de préavis en cas de changement du POT et augmentant la durée de travail initialement prévue,
    – les heures au-delà des dépassements entre :
  • 12,5% et 20% de la durée de travail normale en cas de période de référence ayant une durée entre plus de 1 mois et 3 mois au maximum,
  • 10% et 20% de la durée de travail normale en cas de période de référence ayant une durée entre plus de 3 mois et 4 mois au maximum.

Les heures supplémentaires sont soit compensées par du temps de repos rémunéré, à raison d’une heure majorée d’une demi-heure de temps libre rémunéré par heure supplémentaire travaillée (soit comptabilisées au même taux sur un compte épargne temps dont les modalités peuvent être fixées par la convention collective ou l’accord applicable).

Dans les entreprises qui appliquent une période de référence légale ou conventionnelle, les heures supplémentaires constatées en fin de période de référence sont compensées au courant de la période de référence suivante en application du taux de majoration ci-dessus. Le moment de la récupération est fixé en principe selon le désir du salarié, dans les mêmes conditions que celles prévues en matière de fixation du congé légal,13 à moins que les besoins du service et les désirs justifiés d’autres salariés de l’entreprise ne s’y opposent. Dans ce cas, les heures supplémentaires non encore compensées à la fin de l’année de calendrier peuvent être reportées exceptionnellement jusqu’au 31 mars de l’année qui suit.

Si pour des raisons inhérentes à l’organisation de l’entreprise, la récupération ne peut pas se faire selon ces modalités ou si le salarié quitte l’entreprise pour une raison quelconque avant d’avoir récupéré les heures supplémentaires prestées, le salarié a droit, pour chaque heure supplémentaire, au paiement de son salaire horaire normal majoré de 40%. Ces 140% sont exempts d’impôts et de cotisations en matière de sécurité sociale, à l’exception des cotisations de dépendance et pour prestations en nature sur la part non-majoré (les 100%).

Le salaire horaire est obtenu en divisant les salaires mensuels par le nombre forfaitaire de 173 heures.

Les conditions de salaire des heures supplémentaires ne s’appliquent pas aux salariés ayant la qualité de cadres supérieurs.

Les auteurs
Marc Kieffer
Secrétaire Général de la FEDIL
Patricia Hemmen
Conseillère auprès de la FEDIL