Au cours des dernières années, vous étiez engagé dans diverses associations professionnelles. Qu’est-ce qui vous a motivé dans toutes vos missions et quelles sont les étapes principales que vous souhaiteriez mettre en avant ?

J’avais été exposé au monde des associations professionnelles durant mon mandat de président des PSF de Support. J’avais trouvé cela intéressant de représenter les intérêts d’un secteur. D’essayer de faire émerger l’intérêt général et d’endiguer la menace de l’intérêt particulier. Luc Frieden était notre ministre de tutelle qui avait œuvré à la création du cadre dont plus tard les représentants du secteur ont à mon avis un peu trop abusé pour faire du protectionnisme à la sauce luxembourgeoise. Cela est une autre histoire.

En 2012 Robert Dennewald m’avait fait l’honneur de me demander de rejoindre le CA de la FEDIL. Ensuite ce dernier en a profité pour me proposer la présidence de Business Initiative. C’est le début dans mon implication dans l’écosystème des startups. En 2012 c’était plutôt un grand désert avec une oasis à Belval qui était le Technoport. Le secteur public avait pris le relais du secteur privé abonné absent sur ce sujet. Ensuite avec l’aide de Carlo Thelen et de Michel Wurth nous avons fait évoluer tout l’écosystème. Business Initiative est devenu Nyuko, on a repris l’Impactory pour ensuite créer le House of Start-up. Pierre Gramegna et surtout Nicolas Mackel travaillaient de leur côté sur ce qui allait devenir le LHOFT. D’autres initiatives foisonnaient comme le LuxFuture Lab.

En 2016 j’ai pris la présidence de la FEDIL pour passer le relais à Michèle Detaille en 2019. À nouveau Michel Wurth m’a fortement soutenu dans cette fonction. Période très enrichissante de ma vie professionnelle en formant un excellent tandem avec René Winkin. Nous avons repositionné la FEDIL pour la rendre plus orientée vers ses membres et moins vers la politique. Nous avons donc rangé aux oubliettes le combat ouvert de l’indexation des salaires dans notre pays. Il faut dire que René et moi avons bénéficié d’une chance extraordinaire de la disparition de tensions inflationnistes en Europe. Merci la Banque Centrale.

Ensuite en 2019 j’ai repris la présidence de l’UEL pour un mandat qui s’est achevé fin 2020. Ce mandat a été le plus dur et le plus exigeant mais aussi celui ou j’ai le plus appris.

Dans ce contexte, vous avez eu l’occasion de faire de nombreuses rencontres. Lesquelles vous ont particulièrement marqués ? Pouvez-vous citer quelques sujets mémorables ?

Je ne pense que je puisse en nommer une en particulier. J’ai beaucoup appris aux côtés des directeurs des différentes fédérations professionnelles (FEDIL, ABBL, ACA etc …). Ce sont des personnages atypiques. Lobbyistes professionnels, qui doivent composer avec des présidents qui changent et des politiques qui changent. Eux restent. C’est tout un art. Mais j’ai beaucoup de respect pour chacun d’entre eux et tous m’ont soutenu sans équivoque. Même le très politique Carlo Thelen.

En tant que président de la FEDIL, vous étiez impliqué dans son repositionnement. Quels ont été les éléments les plus importants et que signifient pour vous aujourd’hui les valeurs d’ouverture, d’indépendance et d’engagement de la FEDIL ?

Vous les avez toutes citées, ces valeurs. Elles étaient toujours là mais je les ai faites ressortir. Et puis la FEDIL est centenaire. C’est la plus belle des organisations patronales. L’industrie et la technologie changent le monde. Et puis c’est la concurrence, conquérir des marchés. C’est la compréhension du lien entre la recherche et l’émergence de la technologie. Et puis c’est l’avenir pour nos jeunes. Ma plus grande fierté est l’augmentation du nombre de jeunes qui sont inscrits dans des filières B et C dans nos lycées. Cela prouve que nous devons aller vers eux. Les membres de la FEDIL ont un lien – c’est l’international. Leur marché c’est le monde. Donc il faut de l’ambition pour conquérir le monde.

En 2019, vous avez pris la présidence de l’UEL dont la structure s’est fortement développée par la suite, notamment avec une répartition des tâches plus visible entre les associations membres. Quel bilan tirez-vous de cette réorganisation ?

C’est un peu tôt pour tirer un bilan. Mon analyse était très claire. L’UEL devait s’occuper de dossiers dont ses membres ne voulaient pas s’occuper ou ne pouvaient pas s’occuper de façon efficace. C’est de l’outsourcing. C’est un concept que je comprends bien. Donc les tâches que l’on vous confie doivent être réalisées de façon professionnelle en sachant que ceux qui nous les ont confiées en gardent la responsabilité face à leurs membres. Donc à l’UEL nous devons viser l’excellence. Garder la pluralité des organisations patronales tout en développant des positions fortes sur les relations sociales et la fiscalité. Entre la solidarité et le financement de cette solidarité.

Vos missions vous ont permis d’obtenir un aperçu complet du monde des entreprises. Quelle serait votre vision d’une représentation adéquate des entreprises au Luxembourg mais aussi au-delà de ses frontières ? Dans ce contexte, auriez-vous des conseils à transmettre au nouveau président de l’UEL, Monsieur Reckinger ?

Je ne donne pas de conseil. Chacun doit apporter sa touche personnelle. Et chacun est tributaire du secteur dont il est issu. Il y a là une forme de déterminisme. J’avais la chance d’avoir été industriel et actif dans le secteur financier. Je pense avoir eu une vision réaliste du positionnement international de ce pays. Un pays qui attire et donne de la sécurité juridique à des flux. Pas un pays de boîte aux lettres mais un pays rond-point.

Après huit ans d’engagement en faveur des entreprises, vous avez décidé de vous concentrer sur la croissance et le développement de votre entreprise. Quel est votre bilan personnel de cette expérience ? Quels conseils donneriez-vous à de jeunes entrepreneurs par rapport à cette notion d’engagement ?

C’est une bonne question. Ma conclusion : Engagez -vous en faveur des entreprises ! Cette notion de don est primordiale. Mais faites-le sur une période courte et intense. Que ce soit chez Nyuko, la FEDIL ou l’UEL je me suis employé à développer une vision ambitieuse, un projet qui ne se limitait pas à un objectif précis. Chez nyuko ce fut la vision de Luxembourg Start Up nation, chez la FEDIL ce fut de placer le développement industriel et technologique dans un contexte historique, certes non déterminé mais en continuelle mutation. Donc d’en finir avec l’opposition biens et services, concept suranné. Et finalement chez l’UEL ce fut Luxembourg pays de flux (humains, connaissances et financiers), donc la nécessité de la sécurité juridique. De développer une compétence fiscale au niveau de l’UEL devint une évidence pour moi aussi bien que pour les personnes morales et physiques. J’admets qu’en la personne de Michel Wurth j’avais à côté de moi une personne qui avait beaucoup réfléchi sur ces sujets. Il est clair que sans lui cela aurait été impossible d’entamer ces processus de changements stratégiques. La sidérurgie a toujours réussi a produire des profils capables de développer une vision stratégique pour le développement économique du pays. Tout l’enjeu pour le secteur clé d’aujourd’hui que représente la finance au sens large est de développer une vision à laquelle des personnes qui ne travaillent pas dans ce secteur puissent s’identifier. J’ai beaucoup appris durant cette période de 2012 à 2020. Ce sont des expériences qui m’aident aujourd’hui à développer mon entreprise. J’ai appris à voir le monde d’une façon plus nuancée. J’ai toujours beaucoup de convictions mais moins de certitudes.