On entend souvent qu’il faudra tirer les bonnes leçons de la crise actuelle et de sa période de confinement. Un sujet qui nous est régulièrement rapporté dans ce contexte est celui de la motivation des salariés à travailler, mais aussi celui des taux d’absentéisme particulièrement élevés et les signaux paradoxaux en termes de rémunération en fonction des options choisies par les uns et les autres. 

Les salariés présents en entreprise durant les moments difficiles n’ont pas seulement fait preuve d’engagement pour leur entreprise, mais, dans certaines industries, ils ont également marqué le coup en termes de productivité. Durant les premières semaines du confinement, une partie des personnes hésitaient à se rendre aux postes de travail qui exigent une présence physique dans les entreprises. Or ces dernières ont su rapidement adapter le cadre de travail pour assurer un haut niveau de protection de leurs collaborateurs face au risque de contagion. Ceci n’a pas rassuré tout le monde, d’où le constat de taux d’absentéisme frôlant les 40% en industrie vers la fin du mois de mars. À côté de la hausse impressionnante des certificats d’incapacité de travail, on a également noté les départs en congé extraordinaire pour raisons familiales des parents d’enfants n’ayant pas encore atteint l’âge de 16 ans. 

Depuis lors, la situation a changé avec le retour progressif au travail, d’une part, et la régression des commandes due aux effets de crise, d’autre part. Toutefois, le constat d’une différence démotivante, car négative, entre l’indemnisation de l’inactivité et la rémunération des personnes qui ont continué à travailler laisse un goût amer. 

En effet, les collaborateurs qui sont partis en congé extraordinaire pour raisons familiales, à l’image de leurs collègues en congé de maladie, se sont vus indemnisés à 100% durant toute la période d’absence et, de surcroît, pour ceux en incapacité de travail, en tenant même compte d’un salaire moyen basé sur une situation d’avant crise, où travail du dimanche, travail des jours fériés ou autres primes extraordinaires étaient la règle. Dans de nombreux cas, les collaborateurs qui sont restés pour aider l’entreprise à traverser une période particulièrement difficile d’un point de vue économique et sanitaire ont vu leurs salaires baisser avec la disparition d’éléments de rémunération spéciaux, tels que ceux liés au travail du dimanche ou des jours fériés. Dans les cas de figure, où l’entreprise à dû passer au chômage partiel faute de commandes ou parce que le secteur a dû être fermé, la perte de revenu par rapport aux inactifs est devenue frappante. 

D’aucuns estiment qu’il appartenait aux employeurs de combler le trou pour garder leurs collaborateurs actifs au niveau de la rémunération des inactifs, voire de leur accorder une prime pour honorer leur engagement. D’ailleurs, plusieurs entreprises l’ont fait ou ont essayé de compenser une partie de ce qu’on pourrait appeler une prime publique à l’inactivité. Or, tous ceux qui ont suivi la détérioration rapide de la situation financière des entreprises en crise et de celle de l’État devraient se demander si le problème ne réside pas plutôt au niveau de l’indemnisation des inactifs. En faisant abstraction des indemnités de compensation correspondant au salaire social minimum, il devrait être permis de poser la question si les montants accordés aux personnes ayant arrêté leur travail sur des périodes aussi longues devraient correspondre à 100% d’une rémunération complète en temps normaux ou si, à l’image de l’indemnité pour chômage partiel, il ne faudrait pas pratiquer une différence qui redonnerait toute sa valeur au travail et qui garderait intacte la récompense pour ceux qui décident de poursuivre leur activité dans l’intérêt de leur entreprise et souvent dans l’intérêt de la collectivité tel que nous l’avons vécu avec l’exercice des activités essentielles durant le confinement. 

René Winkin
Directeur de la FEDIL