Chaque année, à travers le Digital Economy and Society Index (Desi), la Commission européenne analyse et suit le progrès des Etats membres dans le domaine numérique. Dans le dernier rapport de 2020, le Luxembourg recule de la 9e à la 10e place. Chaque année, le Luxembourg est classé dans le peloton de tête en ce qui concerne les infrastructures et la connectivité.
Et chaque année, les performances affichées sont plutôt médiocres en ce qui concerne l’intégration des technologies numériques dans les entreprises. Dans le dernier rapport, le Luxembourg se classe 19e parmi 28 pays analysés sur ce sujet. Finalement, le Luxembourg a légèrement progressé sur la numérisation des services publics, où il se situe désormais au milieu du classement.
Depuis plusieurs années, des programmes de soutien publics et privés visent à améliorer la digitalisation des entreprises dans les domaines, où cette modernisation est source de gains de productivité ou source de succès sur les marchés respectifs, sachant qu’un niveau minimum d’intégration de ces technologies peut s’avérer vital pour certains secteurs d’activité. La pandémie du COVID-19 a démontré, si besoin en était, l’importance d’un processus dématérialisé robuste au sein des entreprises, à travers les chaînes de valeur et dans les relations avec l’administration.
Dans le cadre de ses échanges avec le nouveau ministère à la digitalisation, instauré après les élections de 2018, la FEDIL avait avancé la dématérialisation des factures dans les relations B2G comme un accélérateur du processus de digitalisation. D’abord parce que la facturation électronique présente de nombreux avantages pour les entreprises en termes de réduction du coût de traitement administratif et du coût d’archivage, de réduction des délais de paiement et d’amélioration du bilan carbone des entreprises. Ensuite, parce qu’une généralisation de cette technologie dans les relations B2G causerait un effet d’entraînement favorable au processus de digitalisation là, où notre pays affiche manifestement un retard.
L’expérience dans plusieurs autres pays de l’Union Européenne démontre cet effet d’entraînement. En France, depuis le 1er janvier 2020, plus aucune facture papier n’est acceptée par le secteur public. Désormais, seules sont autorisées les factures émises électroniquement. Le Danemark franchissait ce pas déjà en 2005. L’Italie est allée encore plus loin : après avoir introduit l’usage obligatoire de la facturation électronique avec les administrations publiques en 2014, elle a rendu obligatoire la facturation électronique entre entreprises en janvier 2019.
Avec l’adoption de la loi du 16 mai 2019 relative à la facturation électronique dans le cadre des marchés publics et des contrats de concession, le législateur luxembourgeois s’est contenté de transposer strictement la directive 2014/55/UE qui crée une obligation pour les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices d’accepter, de recevoir et de traiter des factures électroniques conformes à la norme européenne. Le projet de loi N°7750, déposé par le ministre délégué à la Digitalisation le 20 janvier 2021, prévoit l’obligation pour les opérateurs économiques d’émettre des factures électroniques. En fonction de la taille des entreprises entrant en ligne de compte, cette obligation commencerait à jouer entre le 1er septembre 2021 et le 1er juillet 2022. La FEDIL partage entièrement cette initiative du gouvernement d’aller au-delà des exigences de la loi du 16 mai 2019 relative à la facturation électronique et de proposer des mesures plus fortes et plus contraignantes en matière de facturation électronique.
Il ne suffit pas de se lamenter sur le fait que le monde des entreprises au Luxembourg traîne derrière ses partenaires en matière de numérisation et d’exiger des actions correctrices gouvernementales. Ici, le gouvernement propose une opportunité pour combler une partie de ce retard. Au secteur privé de saisir cette opportunité. L’introduction tardive de la facturation électronique systématique
et généralisée dans les relations B2G au Luxembourg a donné beaucoup de temps de préparation aux entreprises qui l’ont anticipé. S’y ajoutent les périodes transitoires proposées dans le projet de loi et la possibilité d’une offre de dépannage aux entreprises qui n’y seraient pas encore préparées aux dates butoires. L’heure n’est plus à la revendication de délais supplémentaires retardant davantage cet effet d’entraînement favorable à la modernisation et à la performance de nos entreprises.
La transformation numérique est reconnue depuis longtemps comme clé de succès pour notre économie. Pendant la crise sanitaire, elle a été déclarée source de résilience, à juste titre. Mais la formulation de buzzwords ne suffit pas. Les paroles doivent être suivies d’actes.