Le 22 mars 2017, un accord interprofessionnel relatif à l’aménagement du temps de travail dans le secteur de la navigation intérieure a été signé entre l’association représentative des entreprises actives dans la navigation intérieure, FEDIL BARGING, et les syndicats LCGB et OGBL. Cet accord constitue la transposition d’une directive européenne se basant sur un accord conclu entre partenaires sociaux au niveau européen le 15 février 2012 repris en l’état par la directive 2014/112/UE. Il s’agit de la première directive qui a été transposée au Luxembourg par un accord entre partenaires représentatifs au niveau d’un secteur d’activité et les partenaires sociaux peuvent être fiers d’y être arrivés.
L’alternative aurait été une initiative législative sur un cadre s’appliquant à un environnement spécifique loin des règles du droit commun dans une matière extrêmement technique. L’équilibre à la base de cet accord a pu être trouvé grâce à l’implication des représentants du terrain qui ont pu évaluer en détail que les formulations convenues tenaient compte des réalités et des contraintes existant à bord des bateaux circulant sur les routes fluviales intérieures.
C’est exactement cette implication des partenaires sociaux au niveau approprié qui a été écartée par le législateur dans la mise en œuvre de la loi portant réforme de l’organisation du temps de travail entrée en vigueur le 1er janvier 2017. Au lieu de permettre aux partenaires de trouver des solutions à leur niveau adaptées aux réalités du terrain, un cadre légal fourre-tout, formaliste, inflexible et impraticable a été créé qui ne peut même pas être confiné par les partenaires sociaux élus au niveau de l’entreprise, ceci dans l’intérêt de toutes les parties prenantes en fonction des réalités économiques et organisationnelles. Pire encore, peu après l’entrée en vigueur de cette réforme pourtant prônée par certains milieux politiques comme avancée énorme en matière de flexibilisation du temps de travail, une adaptation des formes et de l’organisation du travail parait inévitable en vue de permettre aux entreprises de s’adapter aux effets de la digitalisation et de tenir compte des attentes de leurs salariés dans ce contexte.
La réforme de la loi PAN est ainsi une occasion ratée pour valoriser le dialogue entre partenaires sociaux légitimes alors qu’elle exclut toute initiative de ces derniers en vue de concevoir ensemble des modèles d’organisation du temps de travail répondant à leurs besoins respectifs.
Il est partant important de tirer des leçons de cet épisode malheureux et de miser à l’avenir davantage sur le dialogue social. L’accord signé récemment entre partenaires sociaux au niveau européen sur le vieillissement actif et la solidarité intergénérationnelle présente dans ce contexte une opportunité à ne pas rater. En effet, l’accord doit être mis en œuvre dans les trois ans de sa signature conformément aux procédures et aux pratiques propres aux partenaires sociaux et aux États membres. Dans cette logique, il semble opportun de transposer un tel accord au niveau européen par voie d’accord entre partenaires sociaux au niveau national. Les organisations des employeurs ont entretemps invité leurs pairs syndicaux à des discussions en la matière en vue d’une transposition dans le cadre d’un accord interprofessionnel. Elles ont également formulé une requête au ministre du Travail de demander à la Chambre des Députés de suspendre en conséquence, le temps des échanges en bilatéral entre partenaires sociaux, la procédure en cours du projet de loi n° 6678 portant introduction d’un paquet de mesures en matière de politique d’âges qui traite également de ce sujet.
À l’instar de l’accord trouvé dans le cadre de la navigation intérieure, les partenaires sociaux seront à nouveau les plus appropriés pour convenir d’une approche réaliste apportant des vraies solutions pour promouvoir le vieillissement actif des salariés. Cette approche est d’ailleurs partagée par le Conseil d’État dans son avis relatif au projet de loi n° 6678.