Les récents votes au Parlement européen sur le paquet Omnibus 1 revisitant, entre autres, les directives CSDDD (devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité) et la CSRD (reporting en matière de durabilité) soulignent une réalité préoccupante : la mise en œuvre des mesures destinées à améliorer la compétitivité en Europe se révèle être un défi politique de taille.

Après la publication et l’accueil positif des rapports Letta et Draghi sur le marché intérieur, respectivement sur la compétitivité de l’UE et des recommandations concrètes qu’ils contiennent, on pensait qu’une feuille de route largement partagée favorisant un redressement de la situation économique avait été tracée et qu’elle serait suivie avec l’urgence qui s’impose.

Suite aux élections européennes de 2024, la nouvelle Commission a clairement affiché son intention de réaliser un programme correctif pour revenir sur une série d’erreurs du passé qui ont commencé par étouffer nos entreprises et qui ont alerté les investisseurs en Europe. Ce programme correctif visant à s’attaquer à une réglementation excessive moyennant plusieurs paquets dits « omnibus » est soutenu, voire réclamé par le Conseil européen, où la grande majorité des chefs d’État et de Gouvernement a bien reconnu l’urgence d’agir. Pourtant, au Parlement européen le paquet Omnibus 1, avec les améliorations importantes des textes sus-mentionnés, n’a pas trouvé l’approbation d’une majorité de députés appartenant aux partis modérés du centre. Cette situation est regrettable.

Nul ne peut remettre en question la nécessité d’agir. Les indicateurs économiques sont là, et ils sont décevants. Une part non-négligeable des députés, promoteurs du projet européen, auraient-ils perdu la capacité, face à des arguments accablants, de changer de cap rapidement et de manière décisive? Certes, cet exercice correcteur n’est pas toujours évident pour eux, car ce sont souvent les mêmes partis et les mêmes décideurs qui, au cours des dernières années, ont soutenu, voire exigé et voté la surrèglementation de notre économie, paralysant ainsi notre moteur de croissance.

Mais persister dans les erreurs du passé et refuser les réformes serait irresponsable et ouvrirait la voie aux partis extrêmes, qui se nourrissent des contre-performances économiques, des caisses sociales vides, des signes évidents de désindustrialisation et de l’anxiété de la population qui suit cette évolution. L’ironie, c’est que ce sont précisément ces partis qui ont néanmoins permis d’obtenir une majorité en faveur de ce premier paquet omnibus. D’autres paquets du même type, destinés à rééquilibrer le cadre réglementaire européen dans plusieurs domaines clés, sont déjà déposés ou annoncés par la Commission. D’autres votes au Parlement européen sur cet agenda de redressement de la compétitivité auront lieu.

Face à nos principaux concurrents sur le marché mondial et face à des économies émergentes qui ont pris confiance en elles et qui nous le font sentir, l’Europe ne peut se permettre de rester passive, si elle veut continuer à jouer un rôle économique et technologique de premier rang et si elle ne veut pas fragiliser son modèle de cohésion et de protection sociales. L’avenir de l’Europe dépend de notre capacité à agir maintenant, en adoptant des mesures courageuses et en faisant ainsi preuve de responsabilité politique.

René Winkin
Directeur de la FEDIL