Dans le plan national énergie et climat, le gouvernement luxembourgeois a annoncé l’introduction d’une taxe sur le CO2. Si les discussions actuelles portent principalement sur l’impact dans le secteur des transports et de la mobilité, elles détermineront également la manière dont l’industrie se développera à l’avenir. La taxe touchera les PME industrielles, et non les grandes multinationales à forte intensité énergétique. Ces dernières étant déjà soumises au système d’échange de quotas d’émission de l’UE.

Pour les PME concernées, les montants de la taxe perçue ne seront plus disponibles pour des investissements dans des projets de transition énergétique, de croissance ou de R&D. Les principaux émetteurs parmi la population de ces PME disposeront ainsi moins de de fonds d’investissement alors qu’ils en auraient le plus besoin pour préparer la transition énergétique.

La taxe pénalise donc les entreprises opérant à partir du Luxembourg. Cette pénalité représente pour l’instant une incitation négative relativement faible s’il s’agit d’inciter un nombre important d’entreprises à réduire leur empreinte carbone. Elle est cependant trop importante pour l’ignorer. Une pénalité plus élevée, en revanche, risque d’inciter les entreprises à réduire ou à délocaliser leurs capacités de production ainsi que leurs futurs investissements.

La FEDIL estime qu’une incitation fiscale positive, plutôt que la taxe CO2 faible, peut inciter un nombre plus important d’entreprises à réorienter leurs investissements en faveur de la neutralité en CO2.

PROPOSITION POUR UNE TAXE CO2 INCITANT À LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Une taxe qui met un prix sur les émissions de CO2 modifie le rapport de coût entre les processus de production à faible teneur en CO2 et ceux à forte intensité de CO2. Elle tend à orienter l’allocation des ressources vers des technologies de production alternatives plus efficaces en matière de CO2.

Pour qu’un tel investissement de substitution se produise malgré une taxe CO2 relativement faible, deux conditions préalables doivent être remplies simultanément : (1) une technologie alternative à faible émission de Co2 et à prix compétitif doit être disponible sur le marché, et (2), l’investissement dans la technologie alternative doit permettre de réduire la charge fiscale tout en réduisant l’exposition future à la taxe.

Selon ces deux conditions préalables, une taxe CO2 visant à encourager l’industrie à investir dans les technologies à faible intensité de CO2 doit suivre les deux principes suivants :

• Permettre une déduction de la taxe CO2 pour tous les investissements qui contribuent à atteindre les objectifs de réduction des émissions ;
• Exonérer conditionnellement les secteurs de la taxe qui ne disposent pas de technologie alternative à faible émission de CO2 et économiquement viable.

Selon ces principes, tous les investissements dans des technologies alternatives à faibles émissions de CO2 y inclut les investissements dans la R&D ou dans des business model à moindre intensité d’émissions pourraient être exemptés de la taxe.
La déduction fiscale autorisée peut être un rapport proportionnel au niveau de réduction des émissions atteint vis-àvis à 2020 et par rapport à l’objectif global de réduction de l’industrie. Par exemple, si l’objectif global de réduction des émissions de l’industrie est de -40 % entre 2020 et 2030, et si l’investissement d’une entreprise permet d’atteindre une réduction des émissions de -32 % par rapport à 2020 : l’investissement pourrait être déduit à 80 % (=32 %/40%). La déduction peut être effectuée annuellement sur les montants dus de la taxe CO2, à partir du moment où la réduction des émissions est démontrée et jusqu’à la fin de la période d’imposition en 2030. En outre, les entreprises devraient être autorisées à échanger les volumes de réduction des émissions sous forme de quotas d’émission de CO2 avec d’autres entreprises au Luxembourg. Les entreprises qui ont des difficultés à atteindre leurs propres objectifs en matière de CO2 pourraient ainsi acheter ces quotas.

La négociabilité de toutes les réductions d’émissions réalisées incite les entreprises à réduire davantage d’émissions que les objectifs de réduction globale de l’industrie. En même temps, elle favorise le concept d’une réduction du CO2 efficiente, sachant que l’investissement par volume de réduction des émissions est très certainement différent d’un secteur à l’autre.

Gaston Trauffler
Responsable politique industrielle auprès de la FEDIL